mercredi 30 avril 2008

Daido Moriyama chez Kamel Mennour



Un petit tour du côté de la rue Saint-André-des-Arts s'impose pour voir les photographies grand format de Daido Moriyama. Un noir & blanc saturé et contrasté au maximum et des cadrages tranchés et frontaux, produisent un impact visuel très fort. L'image s'impose au spectateur. Sans détour ni façon, le photographe japonais nous jette en pleine figure sa vision de Buenos Aires. La brutalité qui émane de ces images est due en grande partie à la texture sablonneuse si particulière des images de Moriyama : les noirs sont charbonneux, les blancs neigeux, l'ensemble prégnant. Tant et si bien que le rapprochement proposé avec les photographies de l'espagnol Alberto Garcia-Alix ne fonctionne pas. De petits formats et un propos plus neutre et doux, font que, malgré des cadrages intéressants, ces images de Pékin ne font pas le poids. La confrontation est déséquilibrée et même regrettable. Cette proposition d'un regard croisé Orient/Occident n'avait pas lieu d'être.

vendredi 11 avril 2008

Shirley Jaffe : une symphonie colorée









La galerie Nathalie Obadia présente un bel ensemble de peintures de Shirley Jaffe, une œuvre que je qualifierais de « musicale ». Des formes et des couleurs, rappelant parfois les papiers découpés de Matisse, sont agencées en un certain ordre, laissant la toile de fond blanche présente. Complexes, les différentes combinaisons présentent pourtant un rythme équilibré créant une mélodie gaie et enlevée. Outre la composition, les différences de traitement dans une même toile créent les variations : des formes nettement découpées en côtoient d'autres à l'aspect plus manuel, des couleurs sont posées en aplat tandis que d'autres sont appliquées de manière plus gestuelle.

Une série de gouaches est aussi proposée dans le fond de la galerie. Le traitement est plus libre et rappelle que l'artiste a d'abord été une actrice de l'expressionnisme abstrait américain. L'eurythmie des compositions et les couleurs éclatantes produisent un effet visuel très efficace. On sort de là plein d'énergie !

lundi 7 avril 2008

Voyage initiatique dans le monde de Patti Smith

Fan de la musique et de la voix puissante et vibrante de Patti Smith, je suis allée à la découverte des autres facettes de l'univers de la rock star…et je n'ai pas été déçue… 

Dans les sous-sols de la Fondation Cartier, j'ai pénétré l'intimité de Patti Smith… 

Les deux salles d'exposition sont plongées dans la pénombre, les différentes enceintes des vidéos laissent s'échapper et s'entremêler « les voix » de la chanteuse, créant un léger brouhaha. Au centre de la salle principale, un salon de fauteuils club a été disposé : le visiteur peut donc s'installer confortablement au beau milieu de cet antre. 

Plus que d'une exposition, il s'agit d'une vaste installation. On peut y voir des vidéos, des dessins, des polaroïds, des objets chers à l'artiste, des textes manuscrits… 

Dans une vidéo où son ami Robert Mapplethorpe la filme se mouvant dans un halo de blancheur, l'artiste y apparaît sensuelle et féminine. Mais ce n'est pas toujours l'image qu'elle donne d'elle. Son physique déconcerte : tour à tour belle ou laide, autant masculine que féminine, elle fait aussi penser à un animal sauvage…

Tout est ambigu, elle nous plonge dans un monde « d'entre-deux ». Les polaroïds et les films en noir et blanc, à l'aspect souvent plus anciens qu'ils ne le sont, les reliques, le culte des morts… tout contribue à donner à l'ensemble un aspect fantomatique et irréel.

Avec elle on va, sur les traces de Rimbaud à Charleville-Mézières ou sur les bords de la rivière dans laquelle Virginia Woolf a trouvé la mort. On va dans les cimetières, sur les tombes de ceux qui l'inspirent… Comme un prolongement de ses poèmes, ses polaroïds illustrent et expriment son regard sur le monde des morts mais aussi sur celui des vivants. Jouant sur les flous, les « non cadrages », les tonalités obscures ou surexposées, on a souvent l'impression d'images d'un autre monde, atemporelles, parlant d'un ailleurs…

Un autre petit film se présente comme un clip poétique pour la très belle reprise de Smell like teen spirit de Nirvana. Dans la seconde salle, une installation vidéo est constituée d'une double projection verticale et horizontale de la mer filmée comme une masse mouvante en plein cadre. Puis, la ligne d'horizon apparaît portant un long bateau…

Il est regrettable que le parti pris de la scénographie ait exclu tout cartel, toute explication… On ne connaît pas la date des différents travaux, on ne sait pas que les couverts, aperçus sur un polaroïd, sont ceux de Rimbaud…

Quoiqu'il en soit, on découvre un univers esthétique cohérent et chargé d'émotions. Patti Smith met de la poésie dans tous les mediums qu'elle utilise.

Influencée par les mélodies incantatoires et langoureuses de certains titres tel ghost dance (Easter), cette poésie prend souvent pour moi la forme d'une complainte car elle exprime toujours, avec une forme d'acceptation, le tragique de la vie. On retrouve ce type d'émotion dans le morceau chanté par l'artiste lors de la conférence de presse tenue le 27 mars à la Fondation Cartier. Très beau moment !