lundi 19 mai 2008

Monumenta(le) Promenade












Sous une voûte culminant à 45 mètres, 5 plaques en acier de 17 mètres de hauteur et 4 mètres de largeur scandent la nef du Grand Palais. Elles sont espacées de 28 mètres et pèsent chacune 75 tonnes, soit 375 tonnes d'acier corten. Du lourd, du grand, du monumental. Tous les superlatifs viennent naturellement qualifier cette sculpture de Richard Serra. L'artiste n'a peur de rien : la réalisation de prouesses techniques nécessite la mise en place de gros moyens. Il travaille avec des ingénieurs pour concevoir l'œuvre, fait fabriquer les plaques par l'usine Arcelor Mittal près de Saint-Étienne. Le convoyage se transforme en une procession nocturne extraordinaire et l'installation est des plus spectaculaires. Un DVD permet au visiteur de visionner l'aventure.

Il faut dire que la tâche n'est pas aisée. Serra avoue lui-même avoir eu une appréhension devant l'immensité du vide qu'il lui fallait remplir. Avec une seule œuvre savamment proportionnée, le sculpteur occupe l'espace du Grand Palais. Tout est affaire d'impression visuelle. Ainsi, par exemple, vues du sol, les plaques semblent monter jusqu'au ¾ de la hauteur de la voûte, ce qui est loin d'être le cas ! C'est la perception du visiteur qui constitue le postulat de départ. Celui-ci est déjà conscient de sa propre dimension physique en rapport avec un espace donné, en l'occurrence le Grand Palais. Il s'agit donc de modifier ou de renouveler sa perception de cet espace.

En pénétrant le lieu par l'entrée principale, on aborde l'œuvre par l'arête des plans ou plaques. Autant dire qu'il ne s'agit pas du point de vue le plus accaparant. Pour que l'installation sculpturale prenne toute son ampleur, il est nécessaire que le visiteur fasse la démarche de se déplacer, d'y accorder du temps. Il est invité à déambuler, à se promener, ce qui a pour effet de stimuler la pensée et la méditation. L'appréhension de l'œuvre se fait donc dans un espace-temps qui lui est propre. Une fois au bout de la nef, la sculpture est complètement présente et l'on découvre, non seulement que les plans ne sont pas alignés, mais également qu'ils sont inclinés. Ceci déstabilise notre vision de l'espace en le « dramatisant ». Une impression de chaos m'a alors envahie…

Cette « Promenade » est une expérience : elle exacerbe la conscience de soi en tant qu'entité physique tout en invitant à la réflexion.